ON APPELLE cela l'état de grâce. Cette impression de facilité qui permet à l'heureux bénéficiaire de dominer la concurrence sans être obligé de mettre les bouchées doubles. Frédéric Coutif (Parisis AC) a connu cela durant le week-end pour inscrire une 35 e victoire à son palmarès lors du 17 e Tour cycliste du Val-d'Oise remis au goût du jour après deux ans d'absence.

« La plus belle, reconnaissait-il à l'arrivée à Argenteuil. La plus chanceuse aussi. » La plus imprévue peut-être également. Car si le Val-d'Oisien fidèle au PAC depuis ses cinq ans n'a jamais semblé en danger dès lors qu'il endossa le maillot jaune à Ennery, il reconnaît volontiers avoir bénéficié d'un incroyable concours de circonstances samedi après-midi. « Lors de la première étape, j'ai commis l'erreur qu'il ne fallait pas en loupant la bonne échappée. Mais, franchement, à ce moment j'étais en queue de peloton et pas en mesure de faire mieux. » Comment ne pas imaginer son étonnement lorsque près de deux heures plus tard il se retrouve en tête de course avec huit compagnons tout aussi surpris. « Nous avons appris que les échappés avaient pris une mauvaise direction. C'est vrai, j'ai bénéficié de cette chance monstrueuse, mais qu'ai-je à me reprocher ? » Sa victoire à Ennery devant David Miskiewicz (ACVO) provoque des remous dans le peloton où les plus amers ne manqueront pas de lui faire savoir leur mécontentement le lendemain matin. Les commissaires calment le jeu en remettant en course les lésés du jour. Les jambes sont lourdes le lendemain matin entre Cergy et Piscop et les velléités, bien pauvres. Frédéric Coutif peut aisément contrôler la situation pour assister aux avant-postes du peloton à la victoire d'Emmanuel Lecreurer (ESP Persan). Mais il lui reste à réussir l'exercice du contre-la-montre qu'il avoue ne pas apprécier. « Avant cette dernière étape, j'ai pu rentrer chez moi et me reposer. J'ai même été reconnaître le parcours pour me concentrer. » Fallait-il encore bien négocier son effort solitaire. « Je ne suis pas parti vite, ça, c'est mon côté fainéant, sourit-il. Mais c'était le bon choix avec vent de face. Après, j'ai produit mon effort. Dans le final, j'étais à 60 km/h sur le 11 dents. » Le chrono se bloque à 14'02'' pour les 10,900 km. La victoire est en poche. « Ce succès dans le chrono démontre que ma victoire n'est pas volée. » Qui pourrait en dire autrement ?